Zoom ? Canva ? Drive ? Finalement le Qi Gong à distance sera sur YouTube

Corine, enseignante de Qi Gong

Parole du 3 juillet 2020, mise en texte avec Martine et Christine

Quand j’ai commencé à enseigner le Qi Gong, je voulais que cette activité soit accessible à tous, je ne voulais pas faire cela dans une association pour riches. Alors, j’ai fondé « Ombre et lumière » avec quelques amis, en 2015.

C’est une petite association où je suis bénévole et, pour l’instant, présidente. Je donne mes cours pendant la pause de midi, aux adhérents de l’association et à des salariés de la ville de Vénissieux, en partenariat avec leur comité d’action sociale. Nous sommes une vingtaine de personnes et nous faisons cela dans une salle de la maison des associations les mardi et vendredi. Je propose aussi une dizaine de dimanche par an, en plein air dans un parc de Vienne. Ainsi qu’environ dix soirées par an à la maison des associations. Je donne enfin un cours par semaine dans une association de Grigny. Quand le confinement est arrivé, cette dernière a décidé que les profs continueraient à être payés. J’ai donc décidé de continuer à donner mes cours, en visio, et de le faire aussi pour « Ombre et lumière ». Il me restait à trouver l’outil.

J’ai vite abandonné l’idée de Zoom. Quand je suis avec un groupe, je peux rattraper des choses qui ne me conviennent pas. Je ne me voyais pas faire un cours en direct, qui laisserait une trace que je ne pourrais pas modifier ensuite. De plus, à quoi servirait une interaction avec des gens que je n’allais pas voir ?

J’ai commencé à m’enregistrer en vidéo, avec de la musique et en parlant. J’ai choisi un Qi Gong facile à partager et que nous avions déjà vu ensemble avant le confinement : les six cercles. Je pensais faire des révisions et, surtout, garder le lien avec celles et ceux qui prennent des cours. J’imaginais reprendre aussi le Wudang, le cycle du bois… et je me suis rendu compte que ce n’était pas si simple. Le son était très mauvais, il me fallait donc choisir entre la voix et la musique, me filmer à une certaine distance. Je devais veiller à tout mon environnement quand j’enregistrais ma voix.

J’ai utilisé ce que j’avais filmé, mes photos, écrit des textes explicatifs, et j’ai monté le tout avec Canva, un outil que je connaissais déjà et dont la version gratuite était largement suffisante pour mes besoins. N’ayant pas trouvé comment insérer l’enregistrement de ma voix, j’ai mis de la musique à la place. Je prenais mes petits bouts de vidéos, je les mettais sur Canva, je déposais mon texte, une image qui ne soit pas trop moche. Ensuite je chargeais cette vidéo sur un Google Drive. Les premières vidéos ne duraient que deux ou trois minutes mais elles m’ont pris un temps fou, plusieurs heures ! Au bout de quelques jours, un adhérent administrateur d’Ombre et lumière m’a dit “ Mais pourquoi ne fais-tu pas une chaîne YouTube ? Ce serait plus pratique pour toi ”.  Je n’avais jamais fait ça mais j’ai essayé. Avec l’ordinateur j’ai toujours aimé bidouiller, chercher, trouver, créer. J’ai donc créé ma chaîne YouTube. C’est effectivement bien plus simple, c’est comme créer un compte Facebook. Cependant, la mise en ligne « tout public » ne me convenait pas. J’avais besoin de me dire que je faisais cela pour des gens que je connais, que je visualise. C’est une autre manière d’être en lien avec eux. J’ai donc choisi de publier des vidéos non répertoriées, que je partage avec un lien.

J’ai alors commencé, avec mon téléphone portable, chez moi. Pour mon « studio d’enregistrement », j’ai aménagé une pièce assez spacieuse pour qu’on me voie, réglé la distance, la hauteur, allumé toutes les lumières, comme un studio. Je me souviens d’une journée horrible. Je n’arrêtais pas de supprimer pour arriver à tout avoir, ça bloquait au milieu de la vidéo, ma connexion internet mettait beaucoup de temps pour télécharger. Et il me fallait trouver ce avec quoi j’allais monter ces vidéos. Je voulais monter du son, de l’image, des photos, mettre du texte, et tout ça sur la version gratuite du logiciel ! J’ai fini par trouver une solution, gratuite aussi : iMovie. Je prends mes films, je les coupe, les séquence. J’enregistre ma voix. Et je fais le montage. Je peux poser deux minutes de voix là où le son sera le mieux audible, et refaire si besoin. Je prends les textes dans mes livres, je leur donne un rythme et je les cale avec de la musique. J’ai toujours fait mes cours avec des CD que j’achète, donc en payant la SACEM. Mais YouTube m’a refusé ces musiques. Alors j’en ai cherché qui soient gratuites et restent dans l’esprit de ce que je fais d’habitude. Je télécharge la musique, je trouve le bon tempo, je peux ralentir ou accélérer, couper, bidouiller, et la mettre assez bas pour que l’on entende plus la voix que la musique. Avec iMovie la qualité de mes vidéos s’est bien améliorée et je mets moins de temps, même si cela me prend au minimum une heure. Au final, chaque vidéo doit durer moins de 15 minutes car au-delà la mise en ligne sur YouTube est payante.

J’ai inséré des temps de méditation à partir d’images qui m’avaient inspirée, comme ce tableau de Hopper qui donne des idées de posture. J’ai mis aussi une poésie parce que j’ai toujours aimé en mettre. J’ai beaucoup lu de poésies pendant cette période-là. En choisir une, la lire, ça me faisait beaucoup de bien. Je la proposais sans prétention, je ne suis pas comédienne … mais j’aime le faire ! J’ai fait ça sur quelques minutes et une personne m’a dit que ça faisait trop. Mais je me suis dit que les gens peuvent choisir, mettre les images et méditer, ou m’écouter, ou encore faire les deux. J’ai eu de très bons retours ; assez vite, les gens m’ont beaucoup remerciée de rester en lien, ils étaient contents de recevoir ça, c’était encourageant… « Ah ! ça me fait plaisir de te voir, et de voir ton sourire ». Pour moi ces retours étaient vraiment un moteur. Les vidéos de Qi Gong que je vois sur internet sont souvent trop « blablabla » pour moi. Soit c’est l’Univers, alors que je suis très terrienne, soit au contraire c’est très austère ; ce n’est pas mon style. Je me suis mise en scène, encore plus que d’habitude. Même si ça avait l’air d’être un peu n’importe quoi, c’était pensé. J’ai fait très attention à ma façon de m’habiller, je me suis maquillée, parce que ça fait partie du décor. J’ai choisi l’endroit parce que je déteste voir des visio où les gens n’ont pas pris soin de leur arrière-plan.

J’ai continué à faire ce travail une fois par semaine, mais sans vouloir proposer une vidéo nouvelle à chaque fois. Ça n’aurait pas eu de sens, je ne fais jamais ça en cours. L’étape suivante consiste à retravailler les vidéos, améliorer le texte et la voix, apporter des précisions. Je pense que je peux utiliser une même vidéo pour faire des séquences différentes. Après plusieurs semaines, j’ai fait un sondage pour savoir comment les gens se situaient et j’ai eu des retours, y compris de personnes qui ont habituellement du mal à venir en cours. Ils ont fait du Qi Gong avec mes vidéos. Certains m’ont dit « Ça m’a servi de faire ça tous les jours, ça m’a donné un cadre, du fait qu’il y a de la vidéo je m’y mets tous les jours ». Quand une personne me dit que mon lien ne fonctionne pas, ça veut dire qu’elle regarde. J’étais en lien avec les gens et c’était comme un cadeau de Qi Gong. Ce sondage m’a permis de répondre à ma question : « Est-ce que ça vaut le coup de continuer ? »

D’habitude, les déroulés de mes stages sont prévus et précis. Mais une vidéo n’est pas une heure de cours, où l’on arrive en disant : « Voilà comment je me sens ». Alors, j’ai plutôt travaillé sur ce que j’avais envie de faire passer, de semaine en semaine. Par exemple, quand j’ai été un peu malade, le thème était la fatigue, le confinement, mais toujours avec l’intention d’être en ouverture. J’ai vécu le décès d’une amie pendant cette période. J’étais incapable d’envoyer un Qi Gong, et j’ai fait une poésie, pour elle, c’était ce que je pouvais partager ce jour-là. Ce travail de vidéo demande d’être dans un registre beaucoup plus personnel et en lien.  

Si je continue, j’organiserai un vrai cours, un temps de stage bien pensé, payant, pas cher et accessible en ligne ! Pour cet été, j’ai envie de tester en proposant deux Qi Gong autour du Triple réchauffeur. Je voudrais créer des sortes d’ateliers, de petites séquences sur un point particulier comme travailler la digestion, la respiration, la fatigue. Je choisirai des Qi Gong qui ne nécessitent pas trop de technique, que l’on peut faire avec plaisir chez soi, tous les jours, qui donnent à ressentir quelque chose tout de suite. J’apporterai aussi quelques informations théoriques, par exemple sur le méridien, et je prendrai un sujet à la fois vaste et précis comme le Triple réchauffeur. C’est ce que je fais déjà quand je donne des cours en présentiel, je propose des cycles, j’ai un objectif, une intention. Je veux adapter ça en ligne, dans des petites formes de dix minutes, sur six semaines.

Si ça marche, si ça plaît, je proposerai quelques stages en ligne, sur abonnement, un par saison, par exemple. La vidéo sera complémentaire des cours, pour retravailler ce que l’on y a vu, l’exercice du moment, une respiration, en essayant de le faire tous les jours.

Parole de Corine, du 3 juillet 2020, mise en texte avec Martine et Christine

Post-Scriptum octobre 2020 : J’ai finalement mis en place ce stage estival, 10 € pour 6 semaines et 15 € d’adhésion annuelle à l’association Ombre et Lumière. Et finalement je viens à ZOOM, puisque je propose dorénavant des cours de cette manière !

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