Santé et travail, paroles de chômeurs

Dominique Lhuillier, Dominique Gelpe et Anne-Marie Waser présentaient leur ouvrage le 27 mars dernier au CNAM

Les médias évoquent de manière récurrente les difficultés rencontrées par nombre de branches professionnelles pour pourvoir des emplois vacants. Ils rappellent parallèlement que le taux de chômage demeure en France supérieur à 8% de la population active. « Suffirait-il de traverser la rue », ou de : « Faire le tour des brasseries installées en front de mer pour obtenir un emploi » ? Mais que savons-nous du vécu professionnel et personnel des personnes en quête d’emploi sachant que 40 % d’entre eux ne sont pas indemnisées. Cet angle mort conforte la diffusion d’idées reçues sur leurs situations : ils seraient des « tire au flanc », des « assistés profitant de la solidarité nationale », … Dès lors, ces représentations légitiment aux yeux du grand public le développement de normes destinées à réduire les droits des demandeurs d’emploi à une prise en charge.

Aussi, les auteurs, psychologues du travail et sociologue, ont-ils entrepris de recueillir des récits de vie de chômeurs tant par des entretiens en face à face que par des ateliers réunissant des salariés en recherche d’emploi.

Ces paroles de chômeurs révèlent d’abord l’extrême diversité des situations. Jeunes en quête d’un tout premier salaire ou seniors licenciés n’abordent pas la recherche d’emplois avec les mêmes ressources matérielles et psychologiques. En revanche, les auteurs soulignent les liens de solidarité transgénérationnels qui se créent et se consolident lors des ateliers où chacun expose sa situation, ses expériences d’entretiens, ses déconvenues mais aussi ses projets. Ces temps de parole partagée constituent des temps de relance pour sortir peu à peu des processus de désaffiliation qui guettent les demandeurs d’emploi et tout particulièrement ceux qui doivent en outre faire face à des problèmes de santé. (Cf. le récit de Pierre : Rechercher un emploi : une contrainte douloureuse et blessante – La Compagnie Pourquoi se lever le matin !). Ces « savoirs d’expérience » s’avèrent essentiels, d’autant que les professionnels œuvrant au sein d’instances publiques d’insertion disposent de moins en moins de temps pour une écoute personnalisée tant ils sont enjoints à faire accepter tout emploi à leurs interlocuteurs.

Être en recherche d’emploi implique – c’est un second angle mort – des investissements matériels, cognitifs et psychologiques. Les périodes de chômage de longue durée accroissent significativement les cas de dépression, de diabète, d’AVC, … Comme l’avait déjà mis en évidence un rapport du Conseil Economique Social et Environnemental (2016), la santé des chômeurs constitue un problème de santé publique largement occulté. (Cf. L’impact du chômage sur les personnes et leur entourage : mieux prévenir et accompagner | Le Conseil économique social et environnemental (lecese.fr)

Nous proposerons prochainement une note de lecture consacrée à cet ouvrage. Il nous fera accéder au travail réel des demandeurs d’emploi mais aussi aux voies et moyens qu’ils mettent en œuvre, seuls ou épaulés par diverses institutions, pour retrouver emploi et santé.

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