Parole recueillie et mise en récit par Dominique B. dans le cadre du projet « Travail et Territoire » conduit par le Centre de Culture Populaire de Saint-Nazaire

Je suis à St Marc, dans le grand jardin de ce vieux Monsieur qui construit une superbe terrasse, et moi, je sers de conseillère pour l’architecte et les menuisiers. Je leur indique aussi que le monte-charge de cette construction ne pourra pas fonctionner. Ils doivent reprendre leurs plans. Qui suis-je pour conseiller, pour donner mon avis sur tel ou tel travail ? Je m’appelle Marie-Jo et voilà 29 ans que je travaille comme employée familiale. Mes tâches sont multiples : nettoyer les logements, récurer, faire les vitres, les chambres, effectuer les achats, prendre soin des personnes âgées, les écouter, les faire rire et les accompagner.
Actuellement, je me rends en voiture chez dix employeurs entre Pornichet, où j’habite, et Saint-Nazaire, distant de dix kilomètres. Ce qui représente cent-deux kilomètres et cinq heures de trajet par semaine, sans compter les moments où je prends mes repas dans mon véhicule. Là où je vais le plus souvent c’est Saint-Marc, à trois kilomètres de chez moi, où j’effectue quinze de mes 35h30 de travail hebdomadaire. Lorsque j’ai un pépin de voiture, c’est mon mari qui m’emmène. Évidemment, ces temps de déplacement et mes frais de transport ne sont pas rémunérés. Ça me fait un salaire net d’à peu près 1900 euros par mois avec 10% de congés payés inclus.
Ce travail réclame avant tout des qualités humaines d’écoute. Mais j’aurais besoin de formations. J’aimerais notamment passer un brevet de secourisme. Un jour, par exemple, j’ai dû relever une dame qui était tombée dans un parterre de fleurs. C’était une femme un peu corpulente et je me suis fait mal au dos. À la suite de cela, j’ai dû me faire soigner par un ostéopathe à mes frais. Par ailleurs, je dois aussi faire face à toutes sortes d’autres situations ; par exemple, rétablir l’électricité chez une autre dame. Pour cela, il m’a fallu téléphoner au Maroc, afin de joindre un proche d’un ouvrier qui intervenait ce jour-là chez ma cliente ; quelquefois, je débouche des éviers, je remplace des ampoules… Généralement, j’effectue tous les travaux ménagers courants. Je suis multitâche. Suivre une formation, ce serait bien, mais à quel moment ? Si je suis absente, je n’ai pas de remplaçante, mon client doit se débrouiller avec une association. C’est compliqué…
Mes employeurs sont très gentils. Certains sont exigeants, d’autres sont lunatiques. Je n’ai jamais vraiment eu de problème à part quelques mots un peu vifs. Mais tout s’est toujours bien arrangé parce que je communique.
Je n’ai pas envie de travailler dans une collectivité ou dans une entreprise parce qu’en CESU (chèque emploi service universel) je suis plus indépendante. Je n’ai pas à pointer à l’aide d’un badge comme le font les employés d’organismes d’aide à la personne. Si je fais un quart d’heure de plus, je ne le compte pas. “Emploi familial” est un métier de service. Ce n’est pas à cinquante-neuf ans que je vais changer ma façon de concevoir mon travail.
Marie-Jo
Voir aussi le récit de Fabienne : « J’étais la seule personne que ce petit monsieur reconnaissait« . Fabienne, comme Marie-Jo, est employée à domicile Saint-Nazaire.
Toutes deux travaillent en situation « d’indépendantes ». La situation est-elle meilleure pour les employées travaillant dans une structure ? Quelques réponses dans le récit d’Hélène, « auxiliaire de vie sociale » que nous avions rencontrée pendant la crise sanitaire : “J’aime les gens, j’aime m’occuper des humains … avec le Covid c’est top”
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Une réflexion sur « Ce travail réclame avant tout des qualités humaines d’écoute »